Par Le National
© Roger-Luc Chayer / Le National


Trenet : artiste indiscutable, homme controversé

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Si 4 000 personnes sont venus rendre un dernier hommage au fou chantant place de la Madeleine, les polémiques post-mortem s'enchaînent sur sa vie privée. Il a eu le courage de rendre public son homosexualité à une époque où ça ne se faisait pas, note une jeune fille, admiratrice de l'homme, plus que du musicien. Autour de l'édifice, parmi les anonymes, deux jeunes parisiennes apprennent le passé trouble de Charles Trenet : vous admirez le chanteur, le poète aussi vous pouvez l'admirer, mais pas l'homme ! tranche un passant.
Il chantait pour les allemands pendant l'occupation et a été condamné au pénal pour détournement de mineurs. Sur la Nationale 7, il envoyait des copains prendre des petits auto-stoppeurs qu'ils ramenaient à la maison, dit l'homme qui connaît bien et respecte l'oeuvre de Trénet. Les petits chanteurs à la croix de bois ont accompagné la messe. Ils devaient chanter Mes jeunes années et ont finalement repris le Requiem de Fauré...
Dans l'Eglise, Mgr Jean-Michel di Falco, évêque auxiliaire de Paris, et le père Bernard Mollat ont accueilli tous les anonymes ou non, croyants ou non croyants, pas pour le dernier spectacle de Charles Trenet mais pour une prière". Ce qui choque une personne, venu par curiosité, c'est justement "l'aspect grandiloquent de son art transposé sur un plan religieux. Alors que sur le plan de la moralité personnelle, c'est en disharmonie avec ce qui se passe aujourd'hui. Jusqu'à quel point les institutions étatiques et religieuses se doivent-elles de célébrer le génie créatif d'un homme public, dont une partie de la vie privée est réputée condamnable ?
Un octogénaire fan depuis 1936 se garde bien de juger cette période trouble de l'histoire : C'est sûr, il n'était pas obligé de se rendre en Allemagne pendant la guerre, mais maintenant, ce qui restera, c'est le surréalisme, la poésie, la joie, la communication, dit-il. Impatient d'entendre le public reprendre en chur les grandes chansons du maître, il reprend Y'a d'la joie de sa petite voix éraillée.

Vincent Riou et Pauline Mallard © digipresse 2001