Par Le National
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Schroeder baisse le ton à un an des élections

BERLIN, 16 août (AFP) - Le chancelier allemand Gerhard Schroeder, réputé pour sa capacité de réaction offensive, semble avoir opté pour une nouvelle tactique : à un an des législatives et en dépit de la mauvaise conjoncture, il entend, imperturbable, défendre son bilan de réformes et voir venir.

Confronté aux virulentes critiques de l'opposition face à des perspectives de croissance moroses, le chancelier social-démocrate vient d'admettre qu'il ne réaliserait pas son objectif de passer sous la barre des 3,5 millions de chômeurs d'ici 2002. Ce qui ne l'a pas empêché d'exclure toute nouvelle réforme économique.

Depuis quelques semaines, le chancelier s'est fait l'avocat d'une politique de la "main tranquille", autrement dit empreinte de stabilité. Les Allemands, affirme désormais Gerhard Schroeder, veulent un gouvernement de "force tranquille", qui "n'agit pas dans la hâte en réponse au moindre éditorial".

Cette attitude marque une inflexion par rapport à l'image de "gestionnaire de crise" que soignait jusqu'ici le chancelier, réagissant rapidement par un "coup de gueule", un arbitrage ou une réforme, aux problèmes et aux débats de la société allemande.

Comme lorsqu'il était intervenu fin 1999 auprès des banques créancières du numéro 2 allemand du BTP, Philipp Holzmann, au bord de la faillite. Ou lorsqu'il a confié à l'écologiste Renate Kuenast les rênes d'un "super ministère" de l'Agriculture et des Consommateurs, en janvier, pour rassurer une opinion traumatisée par la découverte des premiers cas de "vache folle" sur le territoire national.

"La parole du jour après lecture de la presse du matin. Ainsi fonctionnait le système Schroeder", affirme l'hebdomadaire Der Spiegel. "Et voici qu'alors que la crise s'étend, le chancelier croise les bras et ne fait plus que raconter que c'est très bien comme ça !"

L'image de "la main tranquille" était trop belle pour les éditorialistes, nombreux à s'en emparer afin de plaider en faveur d'une "poigne de fer" ou d'une "main résolue". Ou pour parler, comme l'hebdomadaire Die Zeit (gauche), d'un chancelier "à la main tremblante" face aux contraintes macro-économiques.

Lors d'une tournée en Allemagne de l'est, Gerhard Schroeder a récusé mercredi tout immobilisme. Et choisi de défendre son bilan : depuis son arrivée au pouvoir à l'automne 1998, son gouvernement de coalition avec les Verts a déjà "accompli un travail impressionnant".

De fait, la liste est longue : réforme fiscale, réforme des retraites, abandon du nucléaire, assouplissement du code de la nationalité, négociation avec les Etats régionaux d'un nouveau "Pacte de Solidarité" pour la reconstruction de l'ex-RDA, contrat de vie commune pour homosexuels, permis de travail spéciaux pour informaticiens étrangers, etc.

Après avoir marqué la rupture avec l'immobilisme de l'ex-chancelier chrétien-démocrate Helmut Kohl, Gerhard Schroeder serait-il aujourd'hui en train d'y revenir ? C'est ce que Hans-Olaf Henkel, l'ex-"patron des patrons", a dit craindre dans le quotidien populaire Bild.

Pour le journal conservateur Die Welt, le chancelier a opté pour une "tranquillité préventive" : de nouveaux chantiers de réforme en pleine période électorale risqueraient de troubler l'entente de la coalition et l'unité au sein du sein du Parti social-démocrate (SPD).

Mais la déprime économique, que Gerhard Schroeder impute à des "facteurs extérieurs", affecte les sondages. En août, seulement 32% des Allemands font confiance au SPD pour créer des emplois, soit 11 points de moins que le mois précédent, selon l'institut Infratest-Dimap.

Un score au coude à coude avec celui des Unions chrétiennes (CDU-CSU, 33%), qui progressent de 5 points, du jamais vu depuis qu'a éclaté le scandale des "caisses noires" de la CDU fin 1999.