Par Le National
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Grande-Bretagne: le débat sur les crimes pédophiles repart de plus belle

LONDRES (AFP) - La reprise d'une campagne de dénonciation par un hebdomadaire britannique a fait resurgir dimanche le débat sur la prévention des crimes pédophiles, après la condamnation à la prison à vie de l'auteur du meurtre de la petite Sarah Payne qui avait bouleversé le pays.

A la suite de ce meurtre en juillet 2000, le tabloïd News of the World avait entrepris de publier la liste nominative des 110.000 agresseurs sexuels recensés, avec leurs adresses et leurs photos, déclenchant une chasse aux sorcières et le harcèlement de personnes parfois innocentes.

News of the World a publié dimanche la photo et les noms de sept pédophiles dont la police, pour six d'entre eux, a perdu la trace.

La police "nous a demandé de nommer et blâmer des pédophiles très dangereux", écrit en première page l'hebdomadaire dont quatre des photos publiées ont été fournies par la police.

Le chef de l'unité anti-pédophile de la police métropolitaine Bob McLachlan, cité par le journal, a expliqué que la diffusion des photographies des quatre hommes, reconnus coupables d'agressions sexuelles sur des enfants, avait été décidée "dans le but de retrouver leur trace".

Ces hommes ne se sont pas fait inscrire sur le registre des pervers sexuels qui permet à la police de connaître le domicile de personnes déjà condamnées.

M. McLachlan a toutefois appelé la population au calme. "Je veux encourager le public à être vigilant, mais pas à se faire justice lui-même".

Le chef de l'unité pédophile veut éviter la vague de violence qui avait suivi la publication des noms de pédophiles présumés à l'été 2000.

Des groupes de personnes, décidés à venger le meurtre de Sarah Payne, 8 ans, étaient descendus dans la rue. La maison d'un pédiatre avait été prise d'assaut par une foule en colère qui avait confondu "pédiatre" et "pédophile".

La campagne avait cessé lorsqu'il avait été révélé que cinq familles innocentes avaient été contraintes de déménager après des attaques contre leurs domiciles.

Dimanche, la rédactrice en chef de News of the World, Rebekah Wade a justifié la relance de la campagne avec le même argument que l'année dernière: "Vous avez le droit de savoir si un pédophile habite près de chez vous", a-t-elle déclaré à la BBC télévision.

Citant le cas du meurtrier de la petite Sarah, Roy Whiting, condamné mercredi à la prison à perpétuité, elle a affirmé "qu'il avait pu vivre à Littlehampton (...) sans aucune surveillance alors qu'il avait déjà été condamné et qu'il avait refusé un traitement".

Condamné en juin 1995 à quatre ans de prison pour avoir fait subir des sévices sexuels à une fillette de neuf ans, Roy Whiting avait été libéré en novembre 1997, en dépit des recommandations contraires des services d'application des peines, qui le jugeaient dangereux et susceptible de récidiver.

"Alors qu'il existe 110.000 (pédophiles) en Grande-Bretagne qui vivent sans surveillance, la population a le droit d'avoir un accès contrôlé" aux informations les concernant, a-t-elle affirmé.

Les parents de Sarah, soutenus par une campagne médiatique intense, appellent le gouvernement britannique --qui n'a pas donné suite à ce jour-- à créer une "loi Sarah", sur le modèle de la loi fédérale américaine "Megan" qui permet au public de consulter le registre des pervers sexuels.

Le ministre de l'Intérieur David Blunkett, s'est engagé dans une tribune publiée dimanche par News of the World à mieux associer les parents et les quartiers à la lutte anti-pédophile.

Il s'est engagé à déposer un projet de loi, dans l'année à venir, qui prévoit des "peines plus fortes", et notamment la prison à vie pour les agressions sexuelles.

Huit Britanniques sur 10 veulent la prison à vie pour les pédophiles, selon un sondage publié par le Sunday People.