Par Le National
© Roger-Luc Chayer / Le National


Ouganda: Il gagne les élections présidentielles en disant faussement que son opposant avait le SIDA!

KAMPALA, 21 avr (AFP) - La Cour suprême ougandaise a rejeté samedi une demande d'annulation de l'élection présidentielle de mars dernier, au motif que des irrégularités constatées dans le déroulement du scrutin n'en avaient pas affecté le résultat "de manière substantielle".

Le requérant, Kizza Besigye, candidat malheureux à l'élection qui a vu la victoire du président sortant Yoweri Museveni, estimait que le scrutin avait été truqué.


Kizza Besigye

Le recours qu'il avait déposé mettait en cause le président Museveni lui-même ainsi que la commission électorale.

"La commission électorale n'a pas entièrement appliqué les dispositions de la loi (sur l'élection présidentielle)... (mais) cela n'affecte pas les résultats de manière substantielle", a déclaré dans ses attendus le président de la Cour suprême, Benjamin Odoki.

Lors de l'élection présidentielle du 12 mars, M. Museveni, chef de l'Etat ougandais depuis 1986, avait été réélu avec 69,3% des voix contre 27,8% à M. Besigye.

M. Museveni prêtera serment pour un nouveau mandat de cinq ans le 12 mai prochain, suite à la confirmation de son élection par la Cour suprême, a indiqué le ministre chargé de la Présidence, Ruhakana Ruganda.

Dans sa plainte, M. Besigye avait notamment dénoncé des fraudes commises durant l'élection et les intimidations subies par des membres de son équipe électorale.

"Bien que nous soyons profondément en désaccord avec le verdict de la Cour, nous le respecterons et nous suivrons la Constitution", a annoncé M. Besigye lors d'une conférence de presse tenue dans son bureau, peu après que le verdict eut été rendu.

La décision de la cour n'a pas été prise à l'unanimité, mais à la mjorité de 3 (en faveur du président Museveni) contre 2.

"Le principe d'élections libres et justes n'avait pas été respecté dans certaines régions du pays", a toutefois souligné la cour, promettant de rendre plus tard un jugement plus détaillé.

"En raison de contraintes de temps nous ne pouvons pas donner les raisons de notre décision", a expliqué M. Odoki. "Nous rendrons un jugement plus détaillé et en donnerons les raisons à une date ultérieure", a-t-il indiqué.

La plainte avait été déposée le 23 mars et la cour était dans l'obligation légale de rendre son verdict dans les 30 jours suivant le début des audiences.

La cour, par une majorité de 3 juges contre 2, a également estimé que les propos de M. Museveni affirmant que M. Besigye était malade du sida, n'avaient pas violé la loi électorale.

Au cours de la campagne présidentielle, M. Museveni, cité par l'hebdomadaire international Time, avait accusé son principal rival - son ancien médecin lorsqu'il était à la tête de la rébellion, et plusieurs fois membre de son gouvernement ensuite - d'être atteint du sida, sous-entendant qu'il n'était donc pas en mesure d'assumer la présidence du pays.

Les partisans de M. Museveni qui étaient rassemblés à l'extérieur de la cour ont salué le verdict en défilant dans les rues au son d'une fanfare, portant des affiches représentant le président.

"Nous n'avons pas gagné le procès à la Cour suprême, mais... nous avons gagné le procès du côté de l'opinion publique. Les résultats de l'élection sont maintenant légaux, mais ils ne seront jamais légitimes", a affirmé M. Besigye.

Les élections de mars ont eu lieu dans le cadre du système du Mouvement, que M. Museveni a introduit après sa prise de pouvoir en 1986 et qui n'accorde aux partis politiques qu'une existence nominale, ceux-ci ne pouvant pas mener d'activités politiques.

Ce système, décrit par ses adversaires comme un régime de "parti unique déguisé", est censé être un antidote au tribalisme qui a conduit à la mort d'un demi-million de personnes sous les régimes d'Idi Amin et de Milton Obote.