Par Le National
© Roger-Luc Chayer / Le National


Nice : chanter à Monaco

Samedi 8 mars 1997, il est 18h. Du choeur de la cathédrale, un chant s'élève. La chorale chante «Puisqu'il est avec nous tant que dure cet âge...»; malgré un aspect médiéval ce chant reste toujours d'actualité.

Le fait qu'un choeur chante dans une église n'a rien de particulier en soi; pourtant, cette fois-ci les conditions sont réunies pour faire de cette situation un cas à part : le choeur est celui de Chrétiens & Sida - Nice; l'église est la cathédrale de Monaco. Comment ne pas être surpris par l'événement lorsque l'on sait que le sida est un sujet difficilement abordé en Principauté ?

L'émotion est forte au sein du groupe de Nice qui voit ici se réaliser la première action publique de sa chorale depuis sa fondation en septembre 1995. Un an et demi de travail, de partages, de prières aussi, a conduit les membres de cette formation jusqu'à la cathédrale de Monaco pour faire part à tous des réflexions que le sida a provoquées dans leur vie de chrétiens.

La présence ce samedi soir en ce lieu de Chrétiens & sida est donc fortement symbolique. Cela a été souligné par l'homélie de Philippe Blanc, curé de la cathédrale. Il rappellera l'amour du Père pour tous ses enfants, particulièrement pour les petits, les malades, les pécheurs. Un Père qui aime sans juger. Tous les paroissiens présents savent maintenant que des chrétiens en Eglise s'interrogent sur leur foi et le sida, sur l'amour et le sida ensemble.

«Ce soir, le Christ vient nous visiter pour nous dire la folie de l'amour de son Père, pour nous rappeler qu'il a fallu qu'il soit, Lui, défiguré, afin de donner à l'amour son expression la plus parfaite et la plus belle. Il y a aujourd'hui encore des hommes et des femmes défigurés parce qu'ils ont voulu aimer. Comment regardons nous le monde qui nous entoure ? Est-ce avec les yeux du Christ qui s'est donné pour nous par amour ?» En plein Carême, ces paroles donnent sens à notre démarche, nous qui nous apprêtons à recevoir le sacrifice de Dieu.

Le chant fut beau, chacun a fait de son mieux : choeur, solistes, organiste... La Parole entre les notes est passée. A la fin de la célébration quelques paroissiens ont pu exprimer simplement leur peine, leur espérance aussi, leur joie enfin d'avoir pu vivre cet échange en leur cathédrale. «Le sida, nous pouvons aussi en parler dans nos Eglises» : ce fut la réalité ce soir-là en Principauté. Le groupe niçois a vécu cette première dans l'émotion mais aussi dans la joie et la gaieté, heureux du bel accueil du Père Philippe au sein de la communauté de la cathédrale et pour un repas animé qui se finit tard dans la soirée !

Jean-Marie Pottier
Chrétiens & sida - Nice