Par Le National
© Roger-Luc Chayer / Le National


"Loft Story" déborde du petit écran et envahit le web, l'édition et la pub

PARIS, 4 juil (AFP) - En soixante dix jours, "Loft Story", l'émission de télé-réalité de M6, a largement dépassé les frontières de l'audiovisuel pour envahir l'internet, la presse, l'édition, la publicité et peut-être bientôt le cinéma.

Attisé par le recyclage quotidien des images des "reclus volontaires" sur M6 et une énorme couverture médiatique. Le Monde a consacré une trentaine de pages au loft, Libération et Le Parisien plus de quarante, pour ne citer qu'eux même si l'intérêt pour l'émission s'est d'abord exprimé sur le web.

A la mi-juin, M6 dénombrait 413 sites personnels consacrés au loft et à ses locataires, représentant une audience cumulée de 1,5 à 2 millions de visiteurs. A titre de comparaison, la série télévisée "Friends", l'une des plus déclinée sur la Toile, a généré depuis sa diffusion une centaine de sites personnels en France.

Le phénomène a même dépassé les frontières puisque sur les 413 sites, une centaine ont été créés à l'étranger, toujours selon M6.

Le contenu de ces sites n'est d'ailleurs pas toujours très amène, ni pour la chaîne ni pour les "lofteurs". A côté des sites "officiels" et bon enfant, chaque locataire a au moins deux sites de fans, ont en effet fleuri une grande quantité de sites parodiques voire franchement hostiles.

Le magazine Technikart a ainsi créé slowstory.com, qui met en scène huit gastéropodes dans une maison miniature sous le slogan "plus lent, plus chiant".

Plus sérieux, loftscary.free.fr fait réagir les internautes à l'émission, en essayant de dépasser la critique habituelle de voyeurisme. C'est, avec loftstory.org, le site non-officiel le plus consulté par les internautes.

Recyclé par la publicité

Le phénomène "Loft Story" s'est ensuite emparé de l'édition. Trois livres sont parus à ce jour sur le sujet et une dizaine d'autres sont en préparation.

Le porte-parole des Verts, Noël Mamère, a ainsi publié avec Patrick Farbiaz "La Vie rêvée du loft" (Ramsay), dans lequel il dénonce "une initiation au voyeurisme, une soumission à la télésurveillance, une ode aux jeux du cirque".

Vincent Cespedes, jeune professeur de philosophie, se demande quant à lui, dans l'essai "I Loft you" (Mille et une nuits), si une chaîne privée a le droit "d'accélérer le dépérissement de l'intégrité, de l'honnêteté et de la culture chez des millions d'adolescents". Il espère que la jeunesse finira par voir dans Loft Story "l'inassimilable denrée qu'elle se doit de vomir".

Plus léger, "Loft Dingue" de Blaise (pseudonyme d'un écrivain), aux éditions Pauvert, est purement parodique. En 212 pages de dialogues vissés en-dessous de la ceinture, l'auteur dresse un portrait au vitriol du petit monde de la télé-réalité.

Les deux "psy" du Loft, Marie Haddou et Didier Destal, ne sont pas en reste. Ils sortiront leur opus respectif en juillet: "La psy du loft raconte" (Flammarion) et "Les miroirs du loft" (Plon).

La publicité a elle aussi recyclé le loft. Au delà de la participation de lofteurs à des spots, des campagnes sont apparues faisant directement référence à l'émission. Ainsi, cet opérateur de téléphonie mobile affirmant que seule une personne enfermée dans un loft pouvait ignorer ses offres promotionnelles.

D'autres annonceurs, comme des fabricants de cuisine, se sont depuis engouffrés dans la brèche.

Enfin, les 225 mètres carrés les plus connus de France vont également inspirer un documentaire. Le cinéaste Jean-Jacques Beinex tourne dans les coulisses du loft un film qu'il vendra à M6, avant, peut-être, de tourner un long-métrage sur le sujet.