Par Le National
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Le sida a entraîné la fin d'une ''certaine arrogance médicale'', selon Bernard Kouchner

PARIS (AP) -- Vingt ans après le début de la prise de conscience de l'existence du sida, le ministre délégué à la santé Bernard Kouchner revient, dans les colonnes du ''Monde'' daté de mardi, sur cette épidémie ayant déclenché ''un véritable tremblement de terre dont nous n'avons pas encore mesuré l'amplitude'' et raconte sa propre évolution à ce sujet.

La pandémie a selon lui provoqué la ''plus grande secousse des systèmes de santé à travers le monde, et tout particulièrement français'', qui a permis, au travers de ce ''drame considérable'', de mettre ''fin à une certaine arrogance médicale'' et de bouleverser les relations médecin-malade.

Face à ce fléau, les médecins se sont retrouvés ''désarmés, nus'': ''avec le sida, nous avons vécu une remise en question totale, médecins, chercheurs et malades'', estime-t-il, après s'être souvenu de ses propres ''sarcasmes'' de départ sur ce ''syndrôme curieux'' frappant les homosexuels de Californie, alors qu'il était à l'époque à la tête de Médecins du Monde.

Puis il a commencé à comprendre, ''pas assez vite peut-être, pas assez bien non plus'', grâce aux médecins français Willy Rozenbaum et Jacques Leibowitch, qui s'intéressèrent au phénomène dès son émergence, et à son ami le philosophe Michel Foucault, mort du sida en 1984.

Ministre de la santé et de l'action humanitaire en 1992, Bernard Kouchner dit ne pas vouloir faire de reproches aux ministres pour l'affaire du sang contaminé, mais bien à ''certains membres des cabinets ministériels concernés'' qui n'ont pas ''su prévenir des réactions confinées, mandarinales''.

Pour sa part, il dit avoir pu agir''vis-à-vis des toxicomanes avec les prémices d'une politique de substitution et de réduction des risques'' de contamination via les seringues.

Reste que Bernard Kouchner se ''reproche beaucoup de choses concernant la toxicomanie, la prostitution'', rappelant qu'au sein du gouvernement Bérégovoy il était considéré comme le ''gauchiste de service'' et ne voulait pas se ''mettre dans des situations provocatrices'' qui auraient pu le forcer à quitter le gouvernement.