Par Le National
© Roger-Luc Chayer / Le National


"Tous clandestins", des dizaines de milliers d'anti-G8 manifestent à Gênes

GENES (Italie), 19 juil (AFP) - "Nous sommes tous des clandestins", scandent les anti-G8 par dizaines de milliers, 50.000 selon les organisateurs et 30.000 selon la police, dans les rues de Gênes pour leur première manifestation jeudi dédiée aux "migrants".

Aux cris d'"ouvrez les frontières" et "annulez la dette", ils frappent en cadence dans leurs mains. Qu'ils viennent de Grande-Bretagne, de France (notamment Act-Up, la Ligue communiste révoltionnaire ou ATTAC), de Grèce, d'Allemagne, d'Espagne, d'Amérique latine ou d'Italie, ils se disent citoyens d'un même monde et réclament plus de liberté de circulation et le respect des droits des réfugiés.

Aux carrefours proches du centre ville, des unités anti-émeutes viennent renforcer les barrières métalliques érigées pour protéger le centre historique de Gênes où doivent se réunir de vendredi à dimanche les chefs d'Etat ou de gouvernement des sept pays les plus riches et de la Russie.

Un service d'ordre forme une chaîne humaine entre les policiers casqués et des manifestants provocateurs mais non-violents.

"Cette manif n'est pas que pour les migrants, elle montre que c'est nous les grands, nous qui voulons construire un avenir inter-ethnique pour tous, sans éliminer les pays d'Afrique ou d'Asie comme le fait le G8", s'enthousiasme Mamoun M'Baye, un immigré originaire du Sénégal.

Sur les marches de la basilique Sainte-Marie de Carignano, les drapeaux rouges ou cubains croisent des arches de ballons portés par des militants écologistes italiens dans une atmosphère de carnaval. Un petit groupe de lesbiennes brandit la bannière multicolore des homosexuels, à côté de militants "zapatistes" mexicains.

Sous un ciel voilé, tournoient des hélicoptères, copieusement hués à chaque passage par les marcheurs, jeunes pour la plupart.

Certains entonnent "l'Internationale", et pas simplement parmi des jeunes communistes. Des femmes ont fixé sur leur T-shirt des photos symbole de la faim dans le monde, sous-titrées "toutes les trois secondes meurt un bébé".

"Depuis le début des années 1990, le boom économique ne profite qu'aux grands financiers. Un fossé se creuse et les plus pauvres se tournent vers l'extrême droite, ce qui fait les affaires des responsables du G8", dénonce Els Deschoemacker, une Belge des "Comités de travailleurs internationaux".

Les Italiens forment les gros bataillons du cortège. Entre les fanfares, des manifestants ont suspendu à une corde à linge des petites culottes frappées aux initiales des pays du G8 pour protester contre "le linge sale" des grands de la planète et tourner en dérision la consigne du chef du gouvernement Silvio Berlusconi de retirer le linge aux fenêtres durant le sommet de Gênes.

La moquerie se porte également au revers du T-shirt avec des mini-badges proclamant "garlic for peace" (de l'ail pour la paix, en anglais). Une allusion au fait que M. Berlusconi a fait retirer la petite gousse du menu des Huit car il ne la supporte pas.

"Solidaire des minorités: solidaires avec les neurones de Bush", ironise la banderole d'un groupe de Génois qui affirment être bien là "pour la politique et pas pour la fête".

"They make misery, we make history" ("Ils font la misère, nous faisons l'histoire"), contestent des pancartes au milieu desquelles une fluette manifestante de 19 ans s'est affublée "par provocation" d'une cagoule noire et d'un maillot rouge des Brigades rouges, le groupe terroriste d'extrême gauche italien.

Elle promet d'être "en première ligne" vendredi pour donner l'assaut contre la "zone rouge" du sommet bouclée par des barrières grillagées.

"Nous sommes là pour aider l'association Drop the Debt -Annulez la dette- et que les gens ne soient pas obligés de quitter leurs terres", explique Anna Baiardo, 42 ans, animatrice d'une association génoise d'aide aux enfants d'immigrés.

Devant la gare de Brignole des centaines d'Iraniens protestent, eux, contre la violation des droits de l'Homme en Iran et les relations entre le G8 et le régime de Téhéran.