Par Le National
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HIV: contaminées par leur compagnon, elles lancent "femmes positives"

MARSEILLE (AFP) - Deux Marseillaises séropositives ont créé "Femmes positives", une association destinée à celles qui ont été contaminées par leur compagnon, pour "susciter un élan de solidarité; que l'on nous dise : +venez, sortez de votre isolement+".

La quarantaine, Sophie et Christal -les prénoms ont été modifiés- se sont rencontrées en 2000 dans le cadre d'une formation pour séropositifs. "Sur dix personnes, on était trois femmes contaminées dans notre lit, sous notre toit" par un mari ou un compagnon, se souvient Sophie, mère de plusieurs enfants.

Persuadées de n'Ítre pas des cas rares, elles ne se reconnaissent pas dans les associations existantes: "Nous sommes éparpillées, nous ne nous connaissons pas et on ne prend pas en compte nos problèmes". "Les toxicomanes, les transfusés, les homosexuels ont des réseaux associatifs. Pour ces femmes, ils n'existent pas", renchérit Michel Amas, l'avocat de l'association.

"Nos histoires sont horribles, inimaginables pour l'extérieur", explique Sophie.

Au milieu des années 1980, Christal était une "oie blanche". Quand elle découvre que le premier homme de sa vie est marié avec un enfant, elle le quitte. "De toute façon, je t'ai contaminée", lui répond-il. "A l'époque, on n'en parlait pas. Je l'ai pris pour un mythomane. Je ne m'en suis aperçu qu'en 1989 quand j'ai fait un test pour faire ma vie avec un autre homme" avec lequel elle coupe les ponts sitôt les résultats connus.

Sophie apprend sa séropositivité à l'occasion d'analyses en 1999 alors qu'elle se sent très malade. Après un mois d'"état de choc", cette mère de famille exige des explications de son mari qui lui révèle son homosexualité. "Notre couple battait de l'aile. On a eu un seul rapport à cette période".

Elles parlent des "angoisses de mort terribles", des effets secondaires de la trithérapie et de l'inadaptation aux femmes de sa posologie, de l'"éclatement de la famille", des amis qui ne savent pas quoi dire ou se détournent, de la "peur de la déchéance physique", de la douleur des enfants, de la difficulté de reconstruire une vie avec un homme.

Avec "Femmes positives", Sophie et Christal veulent sortir leurs semblables de leur solitude, porter un message à destination des hommes - "Trompez votre femme si vous voulez mais protégez-vous".

A l'inverse de Christal, Sophie a déposé plainte contre son ex-mari. Démontrer scientifiquement que c'est bien l'homme qui a contaminé sa compagne est possible, mais "prouver l'intention de nuire" est plus délicat, reconnaÓt Me Amas.

Ces femmes se trouvent en porte-à-faux avec les associations, selon l'avocat: "Doit-on pénaliser la contamination ? Les associations luttent contre. Grosso modo elles ont raison. Mais là, on est dans des cas très particuliers". Selon Me Amas, personne n'a été condamné pour avoir contaminé un compagnon: "Un homme qui gifle sa femme risque un mois et demi. Là, il ne se passe rien".

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