Par Le National
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L'Asie n'est pas prête à abandonner la peine de mort

TOKYO, 20 juin (AFP) - Par pendaison au Japon, lapidation en Afghanistan ou avec une balle dans la nuque en Chine: les méthodes diffèrent mais la peine de mort reste très largement répandue en Asie, où seuls de rares pays, comme le Cambodge, l'ont abolie.

"L'Asie est le continent le plus rétrograde", déplore Liz Whitelam, responsable d'Amnesty International à Hong Kong. "Elle va clairement à contre-courant des autres grandes régions, comme l'Europe, l'Amérique latine ou l'Afrique", où le châtiment capital a été majoritairement abandonné, regrette-t-elle.

Amnesty n'est pas en mesure de donner avec précision le nombre de mises à mort exécutées chaque année sur le continent "en raison d'un manque d'informations ou de preuves", selon sa responsable.

La Chine devrait être particulièrement montrée du doigt au premier Congrès mondial contre la peine de mort, qui s'ouvre jeudi à Strasbourg (France), car elle exécute plus que tout le reste du monde réuni. Le nombre de mises à mort est un secret d'Etat mais Amnesty en a enregistré au moins 1.263 en 1999.

Pékin défend la peine de mort comme un outil indispensable dans la lutte contre une criminalité en pleine expansion. C'est à ce titre que près d'un millier de criminels ont été exécutés depuis avril dans le cadre d'une nouvelle campagne intitulée "Frapper fort".

Mais, estime Liz Whitelam, "je ne pense pas que les responsables du parti puissent affirmer que toutes les personnes exécutées étaient coupables des crimes pour lesquels elles ont été condamnées".

L'autre grand défenseur asiatique de "la loi du Talion" est le Japon, le seul pays développé avec les Etats-Unis à la conserver malgré les pressions. 53 condamnés y attendaient la pendaison à la fin 2000.

Face à ses détracteurs, Tokyo met en avant que "80% de l'opinion soutient la peine de mort", selon un sondage du gouvernement. "L'attitude japonaise est que quiconque a tué doit subir le même sort", résume un responsable du Parti Libéral Démocrate (PLD), au pouvoir.

De fait, la peine capitale ne fait pas débat sur l'archipel, où les exécutions ne sont annoncées qu'au dernier moment aux condamnés. Leur famille, et l'opinion, ne sont informées qu'a postériori.

"La façon dont sont traités les condamnées dans les couloirs de la mort se rapproche de la torture", accuse Akira Ishikawa, d'Amnesty à Tokyo, selon qui "certains d'entre eux attendent pendant des décennies".

En Asie, le Népal, le Timor oriental et le Cambodge font figure d'exception pour avoir banni la peine suprême.

Mais certains pays s'en approchent. Le ministre de la Justice de Taïwan espère qu'elle y sera abolie d'ici trois ans tandis qu'en Corée du Sud, aucun criminel n'a été exécuté depuis l'arrivée au pouvoir du président Kim Dae-Jung en 1998.

En Inde, aucune peine de mort n'a été exécutée en 2000 et aux Philippines, la présidente Gloria Arroyo, a commué les peines de condamnés à mort à la prison à vie.

Mais, en Thaïlande, le nouveau Premier ministre Thaksin Shinawatra a ordonné une accélération des exécutions de trafiquants de drogue afin de montrer que son pays est résolu à lutter contre le commerce des stupéfiants.

L'arrivée au pouvoir des fondamentalistes musulmans taliban en Afghanistan a rendu la peine de mort plus expéditive: l'adultère peut être puni par la lapidation par pierres et l'homosexualité par un ensevelissement vivant.

Au Pakistan, où la pendaison est la règle, un juge a fait sensation l'an dernier en ordonnant que Javed Iqbal, condamné pour avoir tué une centaine d'enfants, soit étranglé en public, avant que son corps ne soit découpé en cent morceaux et ensuite dissout dans l'acide. Le gouvernement a cependant exprimé son désaccord.