Par Le National
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Brevets pharmaceutiques : l'effet Bin Laden sera-t-il salutaire ?

La psychose du charbon pourrait bien provoquer un réel progrès dans les consciences. A quelques jours d'intervalle, les gouvernements américain puis canadien ont invoqué les accords TRIPS pour contester les droits intellectuels des laboratoires Bayer sur la molécule de la ciprofloxacine. En avaient-ils le droit ?

Oui si l'on admet qu'ils se trouvent en situation " d'urgence sanitaire " face au charbon. Car les accords stipulent que tout gouvernement peut alors se mettre en marge du droit au brevet et recourir à des fabricants de génériques. Il est pourtant difficile d'admettre que l'anthrax constitue une " urgence sanitaire ". Au printemps dernier, les mêmes Américains niaient en effet le caractère d'urgence représenté par l'épidémie de VIH-SIDA en Afrique australe où elle a fait beaucoup, beaucoup plus de 3 morts...

La seule urgence potentielle serait la défaillance du fournisseur qui bénéficie d'un monopole. Bayer se dit aujourd'hui en mesure " de fournir les quantités requises dans le monde entier ". Il y a quelques jours cependant d'après le Wall Street Journal, les Canadiens s'étaient bien trouvés devant une forme de chantage à la livraison. Lequel les avait amenés à se tourner vers un génériqueur avant de capituler sous la menace de foudres judiciaires...

A quelques jours de la prochaine Conférence ministérielle de l'OMC à Doha (Qatar), l'épisode alimentera le débat sur la protection des brevets. L'OMS ne manquera pas d'y faire entendre sa voix, rappelant les propos de son Directeur général à Durban, en juillet dernier. Gro Harlem Brundtland avait alors soutenu que les accords TRIPS " doivent permettre d'améliorer l'accessibilité thérapeutique ". Sans besoin de les renégocier comme le demandaient beaucoup de pays...dont les Etats-Unis.

Source :Wall Street Journal 24 octobre 2001, OMS, 26 octobre 2001