Par Le National
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Affaire Dutroux : cinq ans après, la Belgique attend toujours le procès

BRUXELLES, 13 août (AFP) - Cinq ans après les macabres découvertes de l'affaire Dutroux, la Belgique attend toujours de savoir quand le pédophile et assassin présumé sera jugé par la cour d'Assises d'Arlon (sud-est).

Début septembre, la Chambre des mises en accusation de Liège déterminera si l'instruction menée depuis l'automne 1996 par le juge de Neufchâteau Jacques Langlois est achevée, ouvrant ainsi la voie à un procès d'assises, qui sera alors probablement programmé pour l'automne 2002.

Mais rien ne dit que la justice belge ne jouera pas une nouvelle fois les prolongations en demandant des enquêtes complémentaires, ne fut-ce que pour laisser à plusieurs laboratoires européens le temps d'achever l'analyse des milliers de cheveux retrouvés dans les planques où Marc Dutroux séquestrait ses jeunes victimes.

Les enquêteurs tentent encore en effet, cinq ans après les faits, d'établir par le biais de ces analyses, l'existence d'un éventuel réseau de pédophiles centré autour de Marc Dutroux.

Si, dans quelques semaines, la justice estime que le dossier est bouclé, il n'est pas pour autant certain que Marc Dutroux se présentera devant un jury populaire avant 2003 ou 2004, les parties civiles, comme la défense, pouvant réclamer à leur tour des investigations supplémentaires.

En attendant son procès, Marc Dutroux, qui avait réussi à s'évader durant quelques heures du palais de Justice de Neufchâteau (sud-est), reste détenu à la prison d'Arlon, où des gardiens vérifient toutes les sept minutes s'il est toujours présent et en vie.

Pour autant, "l'essentiel du futur procès d'Arlon n'est pas dans sa date, mais dans la nécessité de tenir des débats précis et intenses, car des assises bâclés feraient injure au victimes", estimait le quotidien bruxellois Le Soir dans son édition de lundi, jour du cinquième anniversaire du début de l'affaire.

C'est en effet le 13 août 1996 que, sur la base de l'immatriculation d'une fourgonnette aperçue quatre jours plus tôt sur les lieux du rapt de Laetitia Delhez, 14 ans, enlevée à Bertrix, près de Neufchâteau, Marc Dutroux avait été arrêté.

Deux jours plus tard, Laetitia était retrouvée vivante avec Sabine Dardenne, 12 ans, au domicile du pédophile à Marcinelle, près de Charleroi.

Mais le 17 août, le pays plongeait dans l'horreur : dans une autre maison de Dutroux à Sars-la-Buissière (sud), les enquêteurs exhumaient les corps de Julie Lejeune et Melissa Russo, deux fillettes de 8 ans enlevées en juin 1995 près de Liège (est), et mortes de faim à Marcinelle.

Le 3 septembre, les restes d'An Marchal (17 ans) et Eefje Lambrecks (19 ans), kidnappées en août 1995 à Ostende (nord-ouest), étaient découverts à Jumet (sud).

Les quatre victimes seront portées en terre lors de funérailles nationales. Mais le chagrin des Belges se transforme en colère et l'opinion demande des comptes à ses dirigeants.

Une commission parlementaire révélera l'ampleur du désastre. En 1992, le ministre de la Justice avait signé la libération conditionnelle de Dutroux, condamné pour le viol de mineurs, contre l'avis des psychiatres.

Dès 1995, la gendarmerie avait suspecté Dutroux du rapt de Julie et de Melissa, mais avait tu ses soupçons pour enquêter en solitaire.

Pour l'éditorialiste du Soir, avec l'affaire Dutroux, "les Belges ont appris à redevenir citoyens, à se montrer actifs dans leur milieu de vie, exigeants à l'égard de leurs dirigeants et attentifs à l'évolution du monde qui les entoure".