Par Le National
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Votre médecin de famille sait-il si vous êtes dépressif?

Une étude a été conduite récemment en vue de savoir si les médecins de famille sont conscients du risque de survenue d'une dépression chez leurs patients âgés (1) Les conclusions sont plutôt troublantes.

Tous les habitants âgés de plus de 65 ans d'une section électorale du Royaume Uni ont été interrogés chez eux pour voir s'ils présentaient des symptômes et des signes de dépression. Après avoir achevé ces entretiens, les investigateurs ont contacté chaque médecin de famille - avec le consentement des habitants - ont obtenu les dossiers médicaux et demandé au médecin, lors d'un entretien en tête-à-tête, si le patient avait eu récemment une dépression.

Dans certains cas, le patient âgé ne pouvait pas donner le nom de son médecin. Dans d'autres, le médecin ne pouvait pas ou ne souhaitait pas donner d'opinion concernant l'état mental du patient. Cependant, une information complète a été obtenue pour 318 sujets, ce qui représente 63% de tous les habitants interrogés.

Les entretiens avec les habitants ont révélé que 19% d'entre eux étaient modérément ou sérieusement déprimés. Parmi ceux-ci, presque la moitié (48%) étaient considérés comme étant " non déprimés " par leur médecin de famille. En d'autres termes, le médecin n'a reconnu l'état de patient déprimé que dans 52% des cas. De plus, il a été constaté que seulement un tiers des patients déprimés reconnus étaient activement traités (par exemple antidépresseurs, appel à des services sociaux ou psychiatriques).

Les auteurs affirment que cette étude est la plus vaste réalisée à ce jour de la reconnaissance de la dépression chez les personnes âgées et de son traitement par les médecins de famille. Bien qu'elle ait été conduite au Royaume Uni, les conclusions s'appliquent probablement à la plupart des pays développés. Il est possible que le type le moins reconnu de patient déprimé ait été le moins apte à exprimer leur détresse à leur médecin de famille ; ceux qui n'ont pas été reconnus étaient plus souvent de sexe masculin, mariés, handicapés physiquement, avec une mauvaise vue et ayant bénéficié de moins de 9 ans de scolarité.

Au vu des résultats de cette étude, il y a un besoin manifeste d'éducation du médecin de famille dans la reconnaissance des symptômes de dépression et la mise à disposition d'options de traitement pour les patients âgés. Les gens âgés, ainsi que leurs amis et familles, doivent être vigilants face à l'association des symptômes suivants (2) :

- humeur déprimée ou irritable
- pensées suicidaires
- lenteur ou agitation
- sommeil perturbé
- perte de l'intérêt ou du plaisir dans les activités usuelles
- difficultés de concentration
- modifications du poids ou de l'appétit

Par prudence, il faut demander au médecin de famille d'évaluer l'éventualité d'une dépression et, si tel est le diagnostic, de prescrire un traitement. Les antidépresseurs ne sont pas toujours aussi efficaces chez les patients âgés que chez les sujets jeunes ; cependant, d'autres approches peuvent être bénéfiques - par exemple, celle d'une équipe de soins multidisciplinaire mise en œuvre par une infirmière généraliste. Les patients âgés déprimés ne doivent pas souffrir en silence - l'aide est disponible, si on la recherche.

1. Crawford MJ, Prince M, Menezes P, Mann AH. The recognition and treatment of depression in older people in primary care. Int J Geriatr Psychiatry. 1998;13:172-176

2. adapted from: American Psychiatric Association Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders. 3rd revised ed. Washington DC: American Psychiatric Press, 1987

Source : Int J Geriatr Psychiatry. 1998;13:172-176