Par Le National
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Le débat sur un mariage homosexuel fait son entrée au Bundestag.

BERLIN, 7 juil (AFP) - La majorité sociale-démocrate (SPD) et écologiste a présenté vendredi au Bundestag sa proposition de loi sur un contrat de vie commune pour les homosexuels, qui, fustigée par les conservateurs, suscite aussi les réticences de certains ministres SPD.

Que le mot "mariage" ait été soigneusement évité n'y change rien: en de nombreux points, la forme d'union proposée est comparable aux contrats de mariage ou de concubinage. Moins le droit d'adoption et certains avantages fiscaux.

Le texte examiné vendredi en première lecture sort tout droit des cartons des écologistes, qui en avaient fait inscrire le principe dans le contrat de coalition conclu avec le SPD après les législatives de 1998.

Il prévoit que les homosexuels puissent s'unir devant un représentant de l'Etat civil. Comme en cas de mariage, chaque partenaire s'engagerait à soutenir l'autre et pourrait prendre son nom de famille ou opter pour un nom double. Les couples homosexuels bénéficieraient des mêmes avantages que les couples mariés en matière d'héritage, de don, d'imposition des propriétés foncières ou de transmission de propriété aux parents proches, d'assurance maladie ou chômage, de bail et autre droit de visite. La séparation se ferait devant les tribunaux, avec pension.

Les Verts, pour qui la cause homosexuelle est un vieux cheval de bataille, n'ont toutefois pas réussi à imposer le droit à l'adoption ni l'alignement sur les couples mariés en terme d'imposition sur le revenu.

Ils ont en revanche fait inscrire la possibilité pour le partenaire étranger d'un couple uni par ce contrat de prétendre au rapprochement familial.

Mais l'idée est loin d'enthousiasmer le ministre social-démocrate de l'Intérieur, Otto Schily. Pas plus que celle d'octroyer aux couples homosexuels les nombreux avantages dévolus aux fonctionnaires mariés.

"Si nous défendons une telle égalité, nous entrons en conflit avec la constitution", a-t-il argué dans une interview mercredi.

C'est bien là l'argument de l'opposition conservatrice (CDU/CSU), opposée comme les Eglises à tout projet de "mariage light" contre-nature: la Constitution allemande place en effet explicitement le mariage et la famille "sous la protection particulière de l'Etat".

A la tribune vendredi, la ministre de la Justice Hertha Daeubler-Gmelin (SPD) marchait sur des oeufs. Il ne s'agit "pas automatiquement" de placer sur un même plan le mariage et les unions de même sexe mais plutôt de reconnaître "la famille sous ses différentes formes", a-t-elle déclaré.

Elle a d'emblée dit s'attendre à ce que la Cour constitutionnelle de Karlsruhe soit "consultée", saisie par les conservateurs. Ceux-ci y pensent mais comptent avant tout faire barrage au texte au Bundesrat, la chambre haute où sont représentées les régions et où l'opposition domine.

La majorité SPD/Verts table, elle, sur une adoption de la loi à l'automne et veut croire en la célébration de premières unions homosexuelles légales avant 2001 - après l'adaptation forcée d'une centaine de lois et de décrets, à en croire la presse allemande.

D'après un sondage de l'institut Forsa, 56% des Allemands sont favorables au projet, tandis que 37% le désapprouvent.

Pour l'Association des homosexuels et lesbiennes (LSVD), le texte avancé représente "un grand pas en avant" mais risque de passer à la trappe s'il est repoussé à 2001, dans l'effervescence des préparatifs pour les législatives de 2002.