Québec Conseil de Presse Gai du Québec

Ville de Montréal Avis et décisions

Date: 7 février 2001

___________________________________

Table de Concertation des Lesbiennes et des

Gais du Québec

Demandeur

et

Provigo

Mis-en-cause

__________________________________

AVIS

Le Conseil de Presse Gai du Québec a été saisi d'une demande d'avis formulée par monsieur Laurent Mc Cutcheon, Vice-président à l'action sociopolitique de la Table de Concertation des Lesbiennes et des Gais du Québec le 11 décembre 2000.

La Table de Concertation des Lesbiennes et des Gais du Québec demande l'examen d'une publicité en apparence discriminatoire envers les homosexuels. Le message est ambigu. Il pose beaucoup d'interrogations. Nous ne comprenons pas le sens de cette publicité et l'objectif recherché par le publicitaire.

(…)

Scénario: Sur la banquette arrière d'un autobus, sont assis entre autres, les trois acteurs du message. Un jeune homme mange des biscuits aux brisures de chocolats. Des graines de biscuits tombent sur sa cuisse droite. Sa voisine de droite, une dame d'âge moyen cueille des graines et les mange. Sur sa gauche, un vieux monsieur aux cheveux blancs feint de vouloir cueillir des graines alors qu'il n'y en a pas…encore. Le jeune garçon se tourne vers lui et d'une manière aggressive lui lance "Toi… pense-y même pas"! Le jeune garçon balaie les graines avec ses mains et l'annonceur présente les biscuits décadents.

Ambiguïté et coïncidences du message:

Les biscuits se nomment décadents. Fallait-il une scène décadente pour les annoncer? Le stéréotype du vieux qui approche le jeune avec des gestes ambigus. Le garçon qui repousse agressivement l'homme et le permet à la femme. Le monsieur âgé (Paolo Noel) est l'interprête d'une célèbre chanson : Je m'appelle Paulette, je suis une tapette de la rue Sanguinette.

Interrogations:

Au nom des communautés gaie et lesbienne, la Table de concertation demande une explication sur la signification de cette mise en scène. En apparence, cette publicité est doûteuse et ambiguë. Elle tend de façon insidieuse à perpetuer des stéréotypes et contribue à entretenir une attitude négative à l'endroit d'une minorité. Si nous n'avons pas compris le sens voulu par cette publicité, il nous fera plaisir d'agréer à ce concept et d'en rire si tel est le sens recherché. Des explications s'imposent.

Par la présente, nous accusons réception de votre lettre du 19 décembre dernier concernant la publicité sur le biscuit Décadent aux brisures de chocolat de la marque Le Choix du Président, et qui a été diffusée au cours de l'automne à la télévision.

Dans un premier temps, je vous réitère formellement les excuses de Provigo Inc. de ne pas voir donné suite plus rapidement à votre lettre. Nous vous remercions également de nous donner la chance de faire valoir notre point de vue, malgré l'expiration du délai contenu dans votre lettre…

(Provigo fait ici un résumé de la publicité)

En bref, nous comprenons que l'homme qui mange le biscuit n'a pas su comment réagir lorsque la femme a pris les miettes, parce qu'il était trop surpris, mais qu'il ne se laissera pas faire une deuxième fois. Ce qui explique bien sa réaction. Nous croyons que peu importe l'orientation sexuelle des personnages, la réaction la plus probable est celle illustrée dans le message.

Dans tous les messages de la campagne, c'est sur le ridicule des différentes situations que le concept repose…. Ces situations ont un dénominateur commun: elles sont toutes aussi farfelues et irréalistes les unes que les autres.

Ensuite, ce message n'a définitivement pas de connotation sexuelle et le sexe des comédiens n'a eu aucune importance lors du développement de celui-ci. Paolo Noel n'a pas été choisi pour son âge ou pour son orientation sexuelle, mais bien pour sa personnalité et sa notoriété. Il est surprenant de voir une femme dans un autobus manger des miettes de biscuits sur la cuisse d'un inconnu, mais il est encore plus étonnant de voir Paolo Noel tenter à son tour de se procurer les miettes!

Ceci étant dit, si le genre d'humour utilisé a pu offenser certaines personnes, nous en sommes vraiment désolés. Nous espérons que ces commentaires aideront le Conseil de presse gai à reconnaître que le but premier de ce message publicitaire consiste simplement à divertir le public cible en annonçant d'irrésistibles produits à un prix des plus bas. Nous vous soumettons que cette publicité ne fait pas de discrimination et n'encourage pas les stéréotypes négatifs contre quelque groupe que ce soit.

(L'explication de Provigo est signée de monsieur Laurent Pepin, Directeur aux Communications et affaires publiques de Provigo)

RECEVABILITÉ

Le Conseil a d'abord statué sur la recevabilité de l'explication de Provigo comme celle-ci était arrivée au dossier bien longtemps après le délai prescrit pour produire un tel document. Le Conseil a longuement discuté de cette question et a décidé, à la majorité des membres, de permettre le dépôt de la réplique de Provigo afin de toujours laisser la chance aux parties impliquées de se faire entendre.

Toutefois, le Conseil considère que ce délai est quasi-inacceptable de la part de Provigo puisque le Conseil s'est justement assuré d'envoyer par courrier régulier et aussi par courriel, à deux reprises par des moyens différents donc, un avis l'informant de la situation. Le Conseil se questionne sur la gestion des plaintes de la compagnie et considère que dans le dossier en litige, il y a eu manque de respect envers notre organisme.

FAITS

Le Conseil a visionné trois fois la bande vidéo offerte par Provigo quant à la publicité en question et a fait les observations suivantes, en réponse aux interrogations de la Table de Concertation:

Non.

Non.

Non.

Non.

Non. Le Conseil est d'avis qu'il y a eu effet de surprise.

Le Conseil croit que cette affirmation n'est absolument pas pertinente au débat.

Il y a possibilité mais aucune évidence de faits prouvant ce point pour le Conseil.

Oui. Le Conseil est d'avis qu'il n'y a pas limpidité sur le sujet de la publicité, les biscuits. Le fait de toucher au garçon sans voir de graines peut porter à différentes interprétations. La publicité n'est pas claire.

Le Conseil n'arrive pas du tout aux mêmes conclusions que la Table de Concertation et est d'avis qu'il n'existe aucun motif raisonnable de blâme dans cette affaire. Le Conseil ordonne aussi que la cassette offerte par Provigo soit déposée au dossier et reste confidentielle, à la demande de la compagnie.

Le Conseil souhaite toutefois informer les deux parties qu'il est conscient des préoccupations générales de la communauté gaie et lesbienne et comme il y a peut-être eu maladresse dans la conception de la publicité, reconnaît que la Table voulait, par son action, souligner aux publicistes que les gais et lesbiennes ne toléreront jamais la discrimination contre eux et elles, de même que l'usage de stéréotypes dans la conception de matériel publicitaire. Pour cette raison, nous croyons que la Table avait raison de dénoncer la situation.

Enfin, Le Conseil se questionne sur la décision de la Table de ne pas soumettre à ses membres lors de l'analyse de ce dossier une expertise du psychologue Alain Bouchard qui existait pourtant au moment d'étudier le dossier.

Les parties à ce dossier peuvent faire appel de la présente décision dans les 15 jours de sa rédaction en suivant les consignes sur le site web du CPGQ.

CPGQ

C.P. 172, succ. Rosemont, Montréal, Québec, Canada H1X 3B7

Téléphone et Télécopieur (514) 728-6436

Web: http://ca.geocities.com/cpgq/index.html COURRIEL: [email protected]